14/02/2020
Le chat est un animal qui est souvent décrit comme indépendant. Mais depuis plusieurs années, les études prouvent que ce petit félin domestique est un animal dont les interactions sociales avec ses humains familiers favorisent son bien-être. Ce qui remet en question la notion d’individu indépendant. Par le mot « interactions », nous comprenons le plus souvent « câlins, caresses ». Mais ce qui nous semble naturellement le moyen le plus doux pour entreprendre un contact avec son chat n’est pas forcement vécu comme tel par celui-ci.
L’homme et le chat :
Les humains et les chats diffèrent sur bien des points. Ils ne perçoivent pas les informations environnementales de la même manière et n’utilisent pas les mêmes canaux de communication. Pourtant ils aiment être ensemble car ils s’apportent beaucoup de bénéfices mutuels. Pour qu’ils vivent harmonieusement, il est indispensable qu’ils créent un lien fort et durable ainsi qu’une communication commune pour bien se comprendre. Il faut également instaurer des interactions riches et agréables pour tous. Sans cette alchimie, le chat peut se désintéresser de l’environnement humain qui lui est proposé pour évoluer. S’il en a la possibilité, il préférera aller à la conquête d’un environnement plus adéquat (les voisins par exemple). Et s’il ne peut s’extirper de sa condition, il pourra présenter des signes de stress (comportements exutoires comme manger en surabondance, se toiletter des heures durant, présenter une inactivité prolongée, être irritable voire agressif….).
Les mains versus les pattes :
Nous (les humains) faisons partie de la famille des hominidés (les grands singes). Nous avons des mains et les utilisons (entre autre) pour percevoir et interagir avec notre environnement. Elles nous servent à prendre, toucher, attraper, serrer, lâcher, écraser, gratter, chatouiller, caresser (...) mais nous les utilisons également pour communiquer. Par exemple, nous nous saluons de loin ou nous nous serrons la main. Nous passons une main douce dans les cheveux ou sur la joue d’un enfant pour le réconforter. Sans oublier la pratique très utile du langage des signes .
Le chat fait partie de la famille des félidés. Son sens tactile et sa sensibilité cutanée diffèrent des nôtres. Par exemple, le chat supporte de rester couché longuement sur un chauffage très chaud. Le chat utilise ses griffes acérées pour évoluer dans son environnement. Démuni de mains, il utilise toutefois le bout de ses pattes et ses griffes pour attraper ses proies ou pour repousser un intrus. Il peut également grimper aux arbres en cas de nécessité. Certains s’en servent de réceptacles pour boire. De plus il communique avec les autres chats par signes visuels et de marquage en effectuant des griffades à des endroits bien stratégiques. Ses pattes lui sont donc très utiles mais elles ne lui servent pas à entreprendre de relations affines avec ses congénères.
L’interaction et l’échange par le toucher :
Pour qu’une interaction tactile soit agréable et positive, l’humain (ce grand singe) utilise très fréquemment la caresse. Il adapte le contact selon la sensation que cela procure mutuellement afin de créer un lien satisfaisant et fort entre les deux protagonistes.
Le chat n’utilise pas ce genre de codes sensoriels pour créer du lien avec ses congénères. C’est un nidicole. Il naît sourd, aveugle et ne peut pas réguler sa température sans la chaleur de sa mère et de sa fratrie. Dès ses 1ers jours de vie, le chaton développe une sensibilité tactile grâce aux stimuli apportés par la mère et grâce aux interactions lui permettant de répondre à ses besoins rythmiques (manger, boire, déféquer…). Par exemple, la mère le lèche pour le stimuler à éliminer ou pour l’imprégner de son odeur (marquage d’entretien). Ceci stimule les terminaisons nerveuses et développe le sens tactile du chaton.
Le chaton malaxe du bout de ses pattes antérieures, les mamelles de sa mère lors de la tétée et ancre ce comportement apaisant. On retrouve souvent ce comportement juvénile chez le chat adulte lorsqu’il pétrit une matière duveteuse et moelleuse qui lui rappelle la texture du pelage et des mamelles de sa maman (couverture polaire, oreiller, pull de son propriétaire …). Ce comportement est souvent associé à des ronronnements. Ainsi le chat s'offre une séance d’apaisement.
Les signes relationnels utilisés par le chat :
Le chat (pour comprendre, évoluer, interagir, s’adapter, agir et communiquer) utilise divers signes. On retrouve des signes visuels, olfactifs, oraux, corporels, gestuels et de marquage. Ils diffèrent et/ou se complètent selon les contextes d’utilisation.
Le contexte global est constitué de ses congénères (les chats), des humains familiers (ses proches) et des humains non-familiers (ceux qu’il ne connait pas), des autres espèces que la sienne (les prédateurs et les proies) et de l’environnement (cadre de vie urbain ou rural …). Le chat utilise en priorité son sens visuel (ultrasensible à la vitesse et à la luminosité) qu’il complète régulièrement par son sens tactile. Ses sens olfactifs et auditifs sont également très efficaces. Le tout est complété par des vocalises construites selon le besoin d’interactions sociales (plus particulièrement avec ses humains familiers qui y sont très attentifs).
L’utilisation du sens tactile pour communiquer :
Les vibrisses lui sont primordiales pour l’exploration tactile des êtres et des choses. Beaucoup plus innervées que les autre poils et reliées à un groupe complexe de muscles, elles allient l’analyse de l’air et des résonances vibratoires pour faire une synthèse du milieu environnemental. Elles servent notamment aux chatons pour se diriger vers la mamelle de sa mère.
Le bout des pattes est très sensible également ainsi que les muscles peauciers (sous-cutanés). Leur sensibilité est plus ou moins importante selon les interactions sensorielles induites par la mère lors des 1 ères semaines de vie (période sensible). La constitution du système nerveux et le bon équilibre neurochimique détermine l’équilibre global du chat (physique et mental) grâce à ces stimulations indispensables. Plus elles seront riches et variées et plus ses sens seront affinés. Le chat adulte utilisera par réflexe et apprentissages, les sens qu’il aura le plus développé afin d’évoluer dans son environnement et de communiquer.
Les chats familiers utilisent en face à face, leurs vibrisses et leur nez pour rentrer en contact. Ceux qui entretiennent des liens affiliatifs forts peuvent se toiletter mutuellement pour entretenir leur relation (marquage d’entretien comme avec la mère dans le nid). Ils se frottent tête contre tête et dorment les uns contre les autres … On peut retrouver ces comportements envers les humains les plus familiers.
La caresse est-elle vraiment aussi agréable pour le chat que pour l’humain ?
Elle est largement utilisée comme renforcement positif dans le lien affiliatif entre l’homme et le chat.
Le chat prend généralement un certain plaisir à se frotter contre les gens et les choses. Cela s’explique par :
Plus le chat (utilisant ces comportements) ressent ces expériences comme positives, plus il sollicite son environnement pour réitérer ses interactions car elles lui apportent une sensation de bien-être. Il n’y a pas de mal à se faire du bien !
Le mode d’interactions par la caresse étant largement utilisé chez l’humain. Il est naturel pour lui de créer un lien d’affinité fort avec son chat grâce à cela. Cela dit, il est important de ne pas généraliser. Chaque chat est différent. Le développement nerveux et neurochimique du chaton dépend de la variation et de la fréquence des stimulations apportées par la mère et par son environnement pendant ses 2ers mois de vie (qu’il faudra entretenir et développer une fois qu’il arrivera dans son nouveau foyer).
Pourquoi certains chats n’aiment pas les caresses ?
Si le chaton fraîchement arrivé dans sa nouvelle famille présente des troubles de l’attention, un déficit de contrôle émotionnel traduit par une peur, une agitation excessive, de l'agression (…), une tolérance très limitée à la manipulation, il se peut qu’il n’ait pas reçu assez de stimuli lui permettant de réguler son équilibre psychique (homéostasie émotionnelle). Dans ce cas, il est plus difficile pour lui d’interagir sereinement avec son nouvel environnement. Il sera important d’analyser le mode d’évolution et de communication qu’utilise ce chaton afin de ne pas créer d’interactions négatives. Faites-vous aider par un professionnel si nécessaire.
Si ce petit n’est pas sensible aux stimuli tactiles (telle que la caresse), elle est à proscrire dans un 1er temps afin de ne pas accentuer le déclenchement de morsures ou griffures (typique du chat caressé mordeur). D’autres modes d’interactions et de communication existent et permettent de ne pas déclencher les frustrations liées à ce déficit. Il est toutefois impératif d’entreprendre des interactions afin de développer et entretenir les relations sociales nécessaires à l’harmonie du binôme homme-chat.
La déception dans la relation homme-chat.
Plusieurs rapports d’études prouvent que les propriétaires de chat préfèrent majoritairement avoir un « chat canapé ». C’est-à-dire qu’ils aiment avoir un chat calme, souvent couché sur le canapé et avec qui ils peuvent faire des câlins régulièrement. Il est reconnu que le chat a un effet apaisant sur l’humain. Les bienfaits des ronronnements et de la calinothérapie ne sont plus à prouver. La production d’ocytocine (secondaire aux ressentis équivalents à ceux émis dans la relation parent-bébé) apporte un réel bien-être. Qui ne se réjouirait pas d’un moment de douceur avec son chat après une journée stressante et éreintante de travail ?
Il arrive que le propriétaire soit déçu par les réactions exacerbées (agressions) ou au contraire de déni de leur chat lorsqu'ils souhaitent lui faire un câlin. Pourtant au-delà de l’interaction bénéfique que nous apporte le câlinage et la caresse, il est très enrichissant de développer d’autres modes interactifs afin de respecter les besoins du chat.
Comment créer du lien et renforcer la relation homme/chat autrement que par la communication tactile ?
Notre petit félin domestique est un formidable compagnon de vie mais il en est pas moins un animal dont les besoins fondamentaux sont souvent sous-exprimés par manque de stimulations et d’enrichissement environnemental. Je reviendrai sur ses besoins dans de futurs articles afin de détailler et d’apporter des éléments permettant d’expliquer la nécessité de les respecter. Je parlerai notamment de l’importance de faire travailler les cognitions du chat en basant les interactions homme/chat sur le jeu et l’observation (regroupant les besoins liés à la prédation).
Dans un 1er temps, je vous apporte des éléments pour comprendre comment créer du lien autour du nourrissage dans mon article : Questions/réponses sur le comportement alimentaire du chat. En respectant ce comportement spécifique du chat et en instaurer des rituels basés sur une communication verbale, visuelle, auditive et/ou tactile (par exemple, allier un mot, un geste, un bruit ou un toucher spécifique à une prise alimentaire agréable), vous pourrez renforcer votre lien avec votre chat.
Le plus important pour créer des interactions agréables pour votre chat est de procéder à une observation régulière de ses habitudes et de ses préférences. Qu’est-ce qui motive votre chat ? La nourriture ? Le bruit des oiseaux ? Les jouets à base de plume ? Regarder longuement à travers la fenêtre ? (…).
Il faut également tenir compte de sa personnalité et de sa sensibilité émotionnelle. Votre chat est-il plutôt timide, plutôt téméraire ou facilement adaptable à toute situation ? Vous suit-il partout ? Miaule-il souvent pour attirer votre attention ? Se lèche-il facilement après avoir été dérangé par un bruit, un mouvement ? Faites preuve d’imagination (cherchez des tutos sur internet) et adaptez-vous selon l’intention que porte votre chat aux interactions que vous lui proposez.
La clé pour harmoniser la relation entre l’homme et le chat.
Tout est basé sur une relation « donnant-donnant ». Le chat est un être sensible qui considère ses humains familiers comme ses parents. Il est nécessaire d’apporter un équilibré entre ce qui est bon pour le bien-être de l’homme et celui du chat. Il ne faut pas oublier que l’homme a le choix d’adopter, d’accueillir un chat. Il en a donc la responsabilité totale et doit répondre à tous ses besoins. Le chat (s’il ne sort pas) n’a d’autre choix que d’évoluer avec les éléments, les interactions et l’environnement que ses humains lui proposent. Dans la majeure partie du temps, cela lui convient très bien mais il se peut que malgré tout l’amour de son foyer, les interactions proposées ne lui conviennent pas car elles sont inadaptées. Ceci provoque un déséquilibre émotionnel qui peut perturber son fonctionnement organique, hormonal et chimique.
Dans ce cas, on peut constater des comportements gênants (morsures, griffures, destructions, vocalises, obésité, malpropreté, désintérêt pour l’environnement …) traduisant des troubles (anxiété, stress, phobie …). On peut également constater des pathologies liées à ces déséquilibres (affection type cystite idiopathique, dépression, baisse immunitaire …). Il est donc impératif en plus de moments de douceur et de câlins, d’offrir des activités physiques et mentales à son chat en tenant compte de sa personnalité, de ses capacités physiques et cognitives et de ses besoins sociaux.
A l'inverse, une affection ou une pathologie peuvent perturber l'équilibre mental et provoquer des troubles du comportement. Si malgré un enrichissement personnalisé de l'environnement et des relations sociales fréquentes et adaptées, votre chat présente des réactions excessives (ou au contraire réagit peu voire pas), il est conseillé de réaliser un contrôle de santé chez votre vétérinaire.
Article écrit par Valérie CANTALOUBE